ARS LONGA VITA BREVIS

Retraité mais confiné, incapable de régler ma box pour capter la télévision, je vis sans chaines ni grilles, ce qui je l’avoue, ne me manque guère, même si je rate des tas de trucs dont les gens parlent le lendemain.
Confiné, donc, et ne sortant guère, je préfère passer des heures à bouquiner, à cuisiner, à réfléchir au sens de nos vies dans ce monde de bruit et de fureur. Et si je sors, mes échanges se limitent en grande partie à ceux que j’ai avec les commerçants de mon quartier et, de temps à autre, avec un interlocuteur de rencontre, pour le meilleur comme le moins bon ( le pire c’est franchement rare). C’est avec ces micro-trottoirs que je prends la température du climat social. L’inconnu ne triche pas : il ne vous connaît pas et vous livre sa vérité sans l’enrober. A vous de jouer, de répondre ou de passer votre chemin.

Des échanges cordiaux et enrichissants
Ensuite, comme j’ai pas mal de temps libre « grâce » au confinement, je traîne pas mal sur FB, le réseau social des vieux, puisqu’il paraît que Twitter et autres bidules sont vachement mieux, plus réactifs et toussa… J’assume mon côté vieux machin et me contente de FB qui remplit amplement sa fonction, pour le meilleur et pour le pire. Il arrive ainsi que je tombe sur des amis d’amis qui eux-mêmes ne seraient pas mes amis dans la vraie vie. Mais pourquoi être ami sur FB avec des gens dont on ne partage pas les idées ? La réponse est simple : je ne me referme pas sur une petite communauté avec qui je serai d’accord sur tout, perdant ainsi de vue le reste de la population. J’ai donc dans mes contacts FB quelques personnes dont je suis très loin de partager les opinions. Elles me servent de veille technique en des domaines divers. Ce qui parfois m’embarque en des contrées extrêmes mais m’offre une vision étonnante sur quelques uns des cancers qui rongent notre société.

Planqué derrière une identité bidon on peut se lâcher….
Evidemment, il arrive que l’on marche dans des trucs plutôt bruns, glissants et malodorants. Ces pages là sont la plupart du temps affichées sous des pseudonymes et des avatars fantasmés. Dans cet anonymat supposé, il est plus facile de s’afficher identitaire, raciste, extrémiste de toute obédience. Le pseudonyme permettant d’afficher à bon compte un mental de « résistant » comme en quarante. On s’y fait très vite qualifier de moutons, de petit bourge, pour ne retenir que les qualificatifs les plus sympathiques. Le dialogue consiste le plus souvent à affirmer son accord et son empathie pour des théories nauséabondes. Et si d’aventure, vous laissez entendre que : « certes, oui, mais…. », ce simple « mais » vous vaut en général un tombereau d’insultes . Echanges brefs et rarement courtois qui me laissent à penser que je ne souhaite pas que ces gens là arrivent un jour au pouvoir avec leurs certitudes bien tranchées.

Des hologrammes parait il…. selon des sources « bien informées »
Le stade supérieur, si l’on peut dire, ce sont les pages délirantes consacrées à LA VERITE…. sur les attentats, les vaccins, les maitres du monde, etc…. Là on peut se taper de franches rigolades. On apprend ainsi que les avions que le monde entier a vu s’écraser sur les tours du World Trade Center étaient des hologrammes…. Comment ai je pu croire que c’était des vrais avions ? Faut il que je sois décervelé par la conspiration médiatico-judéo- maçonnique pour ne pas m’être rendu compte de cette supercherie ? En plus c’est faux. Les avions étaient réels, mais les deux tours étaient des hologrammes. Ne me remerciez pas, je vous devais la vérité.
Et, comme le souligne un de mes amis (dans la vraie vie), si ce qu’ils racontent avec force détails à longueur de pages était réel, il y a longtemps que les supposés « maitres du monde » les auraient zigouillés. De fait, lorsque l’on dénonce de vraies magouilles, on risque sa peau. Demandez aux journalistes mexicains qui enquêtent sur la collusion entre la police et les narcos ce qu’ils en pensent… Ce n’est qu’un exemple.

« Evolution, mon cul » s’exclama Zazie.
Pour conclure, je suis persuadé que, chez les premiers hominidés, il devait déjà exister le même pourcentage de mecs ouverts, sympas et curieux de leur environnement, mais aussi le même pourcentage de crétins bornés, haineux et méchants. Les avancées technologiques, si elles ont permis à l’humanité de s’élever par la maitrise du feu, de l’agriculture, de l’électricité, pour ne citer que les paliers les plus importants, n’ont pas eu d’impact décisif sur l’intelligence collective. Nous sommes toujours prêts à nous foutre sur la gueule pour de la bouffe, une religion, du sexe ou du pouvoir. Pas encore sortis de la caverne. Le chemin est long. Ars longa vita brevis.
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